LE REFUS DE PERMIS DE CONSTRUIRE POUR UN DEMANDEUR VAUT-IL PERMIS TACITE POUR L’AUTRE?
DANS QUELS CAS LA DEMANDE D’AUTORISATION D’URBANISME PEUT-ELLE EMANER DE PLUSIEURS PETITIONNAIRES ?
Plusieurs pétitionnaires peuvent être à l’origine d’une demande d’autorisation d’urbanisme au regard des différents CERFA de demande. En effet, ces documents précisent d’une part que seul l’un des pétitionnaires remplit le formulaire principal et les autres doivent remplir la fiche complémentaire. D’autre part, si l’administration notifie la décision au demandeur principal, une copie est adressée aux autres demandeurs.
L’ensemble de ces demandeurs sont alors co-titulaires de l’autorisation d’urbanisme et solidairement responsables du paiement des taxes.
QUELS ETAIENT LES FAITS DE L’ESPECE ?
Deux sociétés ont déposé une demande de permis de construire pour la création d’un hangar et d’un local. La décision expresse de rejet rendue a été notifiée à l’un de ces deux sociétés.
Alors la seconde société qui n’a reçu aucune décision essaie d’obtenir un certificat de permis tacite. Mais la commune le lui refuse, la société intente un recours contre le refus de certificat de la commune. Ce recours est rejeté en première instance par le tribunal administratif de Montpellier et en appel par la Cour administrative d’appel de Marseille (CAA Marseille, 11 décembre 2018, n°17MA04408).
Dans le cadre du pourvoi en cassation formé par la société pétitionnaire, le Conseil d’Etat s’est saisi de l’occasion pour préciser les effets, sur les co-demandeurs, d’une notification de rejet à l’un des demandeurs (CE, 2 avril 2021, Société Serpe, req. n°427931).
QUEL EST L’EFFET EN PRINCIPE DU REFUS SUR LES CO-DEMANDEURS ?
Concernant la notification de la décision d’autorisation ou de refus de permis, l’article R.424-10 du code de l’urbanisme impose la notification au demandeur par lettre recommandée avec accusé de réception. Quant à l’article L.424-2 du même code pose que le permis tacite est accordé si aucune décision n’est notifiée au demandeur à l’issue du délai d’instruction.
Ces dispositions ne précisent pas le cas, en cas de demandeurs multiples, d’une décision de refus notifiée qu’à l’un des demandeurs. Le Conseil d’Etat est donc venu poser un principe sur ce point.
Dès lors que l’autorisation d’urbanisme est refusée au regard de l’impossibilité de réaliser légalement la construction envisagée, la notification de cette décision expresse de rejet à l’un des demandeurs avant l’expiration du délai d’instruction fait obstacle à la naissance d’un permis de construire tacite à l'expiration de ce délai.
Cette solution s’applique notamment aux co-demandeurs auxquels le refus n’aurait pas été notifié avant l’expiration de ce délai d’instruction.
QUELLE EST L’EXCEPTION ENVISAGEE A CE PRINCIPE ?
Le Conseil d’Etat envisage dès lors une exception à ce principe du refus de permis de construire tacite pour les co-demandeurs. En effet l’arrêt pose une nuance dans l’hypothèse où la décision de refus du permis ne rejette la demande qu’en tant qu’elle émane du demandeur principal et pour des motifs propres à son projet de construction, le fait de ne pas disposer d’un titre l’habilitant à construire par exemple.
Dans ce cas seulement, la décision expresse de refus notifiée au demandeur principal ne s’oppose pas, par elle-même, à la naissance d’un permis tacite, à la suite de l’expiration du délai d’instruction, au profit des autres demandeurs et en ce qui concerne leurs propres projets de construction.
Ainsi, une attention particulière doit être portée aux motifs de la décision de refus notifiée. En l’espèce, la décision était fondée sur l’inconstructibilité du terrain d’assiettes. Dans ce cas, les co-demandeurs ne pouvaient se prévaloir de la naissance d’un permis de construire tacite.
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