Cass. 3e civ., 9 oct. 2025, n° 24-12.637, n° 439 FS-B
Jusqu’à cette décision, la Cour de cassation considérait que lorsque l’exproprié ne répondait pas à l’offre de l’administration ni ne produisait de mémoire en réponse, le juge devait se limiter strictement à la proposition de l’expropriant, sans aucun pouvoir d’appréciation (Cass. 3e civ., 17 juil. 1973, n° 72-70.198 ; Cass. 3e civ., 23 sept. 2020, n° 19-20.633 ; Cass. 3e civ., 15 févr. 2024, n° 22-16.462).
Cette approche rigide reposait sur le principe selon lequel le juge ne peut statuer au-delà des prétentions des parties (article 4 du code de procédure civile). En pratique, elle aboutissait à désavantager l’exproprié, souvent peu informé des critères d’évaluation foncière ou des montants réels de dédommagement.
Dans cette affaire, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence majeur. Elle juge désormais que le magistrat, « tenu de fixer l’indemnité d’après les éléments dont il dispose », peut allouer une somme supérieure à l’offre de l’expropriant, dans la limite de la proposition du commissaire du gouvernement.
Cette évolution repose sur la reconnaissance du rôle actif du commissaire du gouvernement, considéré comme partie à la procédure (CEDH, 24 avr. 2003, Yvon c/ France ; Cass. 3e civ., 23 juin 2010, n° 09-13.516). En pratique, cette autorité dispose d’une expertise foncière approfondie et de données fiables permettant une évaluation juste de la valeur du bien exproprié.
Ainsi, même en cas de silence de l’exproprié, le juge n’est plus enfermé dans l’offre administrative : il peut rechercher une juste indemnisation, conforme à la finalité protectrice du droit de l’expropriation.
Lorsque l’exproprié répond à l’offre ou dépose un mémoire en réponse, la Cour précise que le juge ne peut dépasser le montant demandé, même si la proposition du commissaire du gouvernement est supérieure. Ce principe préserve l’équilibre procédural entre les parties et la sécurité juridique du contentieux indemnitaire.
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