COMMENT RÉAGIR EN CAS DE RETARD DE PAIEMENT DANS LA COMMANDE PUBLIQUE ?
QUEL EST LE CADRE JURIDIQUE APPLICABLE AUX DÉLAIS DE PAIEMENT ?
En matière de commande publique, les délais de paiement sont strictement encadrés par le Code de la commande publique (CCP). Le délai de principe est de 30 jours (article R. 2192-10 CCP), porté à 50 jours pour les établissements de santé et 60 jours pour certaines entreprises publiques (article R. 2192-11 CCP). Ces délais sont d’ordre public : ils ne peuvent être ni modifiés ni écartés contractuellement.
En cas de dépassement, l’entreprise peut réclamer des intérêts moratoires ainsi qu’une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros par facture (articles L. 2192-12 et D. 2192-35 CCP). La renonciation à ces intérêts est interdite (article L. 2192-14 CCP).
La jurisprudence européenne confirme l’obligation des États membres de garantir un respect effectif de ces délais : la CJUE a ainsi condamné le Portugal (CJUE, 11 juillet 2024, aff. C-487/23) et la Slovaquie (CJUE, 19 septembre 2024, aff. C-412/23) pour ne pas avoir suffisamment veillé à leur respect.
En France, la transparence s’améliore grâce à la publication des délais de paiement des collectivités (www.data.gouv.fr), mais les retards persistent.
COMMENT ANTICIPER ET RÉAGIR FACE À CES RETARDS DE PAIEMENT ?
Pour limiter les risques financiers, plusieurs leviers contractuels peuvent être activés :
L’avance est obligatoire pour les marchés > 50 000 € HT avec un délai > 2 mois (article R. 2191-7 CCP) et peut aller jusqu’à 30 % du montant TTC. Elle est un outil préventif puissant face aux retards.
L’acompte, quant à lui, est un paiement partiel de droit pour les prestations déjà réalisées (article R. 2191-20 et suivants CCP). Il doit être sollicité régulièrement pour sécuriser la trésorerie.
Le paiement partiel définitif permet, hors marchés de travaux, un règlement irréversible d’une partie des prestations (article R. 2191-26 CCP).
En cas de difficulté, le titulaire du marché peut céder ou nantir ses créances (articles R. 2191-45 et suivants CCP) ou recourir à l’affacturage ou à l’affacturage inversé (issu de la loi Pacte de 2019) pour obtenir un paiement anticipé via un tiers financier.
Enfin, l’escompte commercial peut être prévu contractuellement pour bénéficier d’un paiement anticipé contre une réduction.
Ces outils sont complexes à manier mais essentiels pour préserver la solidité financière de votre entreprise. Le Cabinet Lapuelle vous aide à les mettre en œuvre efficacement.
QUE FAIRE EN CAS DE DIFFÉREND AVEC L’ADMINISTRATION ?
Avant d’engager un recours contentieux, il convient souvent de passer par une phase amiable obligatoire, prévue dans les Cahiers des Clauses Administratives Générales (CCAG).
Un différend peut naître :
- d’un refus exprès de payer,
- du silence après mise en demeure,
- ou de l’absence de notification du décompte de résiliation.
Dans ce cas, une mise en demeure est indispensable. Ensuite, l’entreprise dispose de deux mois pour envoyer un mémoire en réclamation précisant les montants, leur justification, et les bases de calcul (CE, 27 septembre 2021, n° 442455). Il est crucial d’y joindre tous les justificatifs : factures, bons de commande, bons de livraison.
Si l’administration garde le silence pendant deux mois, une décision implicite de rejet naît. Le titulaire peut alors saisir le juge administratif par :
- un référé provision, pour obtenir rapidement une avance,
- ou un recours au fond.
Il faut également vérifier l’existence de clauses attributives de juridiction ou la nécessité de saisir le Comité consultatif de règlement amiable (CCRA) avant toute action.
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