ICPE : LA SUSPENSION D’UNE CONSIGNATION EST-ELLE UNE URGENCE ?
TA Besançon ord., 26 janvier 2024, SARL A. Mulin et fils, n°2302191
LE PRÉFET PEUT-IL OBLIGER UN EXPLOITANT À CONSIGNER UNE SOMME D’ARGENT ?
OUI – Aux termes de l’article L.171-8 du Code de l’environnement :
« I.-Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. En cas d'urgence, elle fixe, par le même acte ou par un acte distinct, les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l'environnement.
II.-Si, à l'expiration du délai imparti, il n'a pas été déféré à la mise en demeure, aux mesures d'urgence mentionnées à la dernière phrase du I du présent article ou aux mesures ordonnées sur le fondement du II de l'article L. 171-7, l'autorité administrative compétente peut arrêter une ou plusieurs des sanctions administratives suivantes :
1° Obliger la personne mise en demeure à s'acquitter entre les mains d'un comptable public avant une date déterminée par l'autorité administrative du paiement d'une somme correspondant au montant des travaux ou opérations à réaliser. […] ».
En l’espèce, la SARL Mulin et Fils exploite une fromagerie industrielle sur le territoire de la commune de Noironte. Or, en 2020, les fromageries industrielles du Doubs comportant une station d’épuration ont été contrôlées par les services de l’Etat et le contrôle de la fromagerie Mulin a montré qu’elle ne respectait pas les obligations qui étaient les siennes en matière de rejet d’eaux usées. A la suite de ce contrôle et de deux ans d’échanges avec la préfecture du Doubs pour régulariser la situation de la SARL, de nouveaux contrôles ont confirmé le non-respect de ses obligations par le fromager et ont montré que des travaux devaient être réalisés sur sa station d’épuration pour que ses rejets ne polluent pas les cours d’eau dans lesquels elle rejette ses eaux usées. Le préfet du Doubs a alors mis cette société en demeure de se conformer à ses obligations environnementales sous peine de sanction. Mais, cette mise en demeure étant restée sans effet, le préfet a pris un arrêté rendant la société Mulin redevable d’une somme de 1 500 000 euros destinée à être consignée pour permettre le financement des travaux nécessaires à la mise aux normes de sa station d’épuration. Cette société a alors saisi le tribunal administratif de Besançon pour qu’il annule cet arrêté et, dans l’attente de la décision au fond, a saisi le juge des référés pour qu’il en suspende l’exécution.
UNE CONSIGNATION PEUT-ELLE ÊTRE SUSPENDUE AU REGARD DE L’IMPACT SUR LA SITUATION FINANCIERE DE L’EXPLOITANT ?
NON – En l'espèce, le juge constate en effet l’impact financier de cette consignation sur l’exploitant et estime que cela pourrait constituer une situation d’urgence.
En revanche, le juge estime qu’au regard des manquements de la fromagerie et des éléments versés au dossier, il y a « une atteinte suffisante aux intérêts protégés en particulier par l’article L. 511-1 du code de l’environnement justifiant que l’intérêt général s’oppose à la suspension de l’exécution de la mesure de consignation prise à titre de garantie et du titre de perception subséquent ».
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